Lorsque l’équipe de casting d’une grande chaîne de télévision française repère votre passion pour les desserts et la pâtisserie, la preuve est bien là : les réseaux sociaux, et plus particulièrement Instagram, ont une puissance et une influence non négligeables.
Alexandre Formica est collaborateur commercial dans une entreprise de matériel pour l’horeca. Il habite à Les Bons Villers, dans le Hainaut. Il aime cuisiner, faire de la pâtisserie et faire bonne chère. Le seul fait de pouvoir préparer le dessert de Noël pour ses proches le réjouissait instantanément. Voulant s’améliorer à chaque fois, il a cherché, par tous les canaux possibles, à enrichir ses connaissances. Alexandre y est parvenu sans aucune expérience professionnelle. C’est un véritable autodidacte. Revues spécialisées, magazines, blogs et sites web : il tirait son plan grâce à ces différents supports et réalisait des dizaines de tests de pâtisserie dans sa modeste cuisine. Tout cela lui a permis d’acquérir suffisamment d’assurance pour photographier ses créations et les poster sur Instagram, accompagnées de leur recette.
C’est par ce canal que les créateurs de l’émission ‘Le Meilleur Pâtissier’ ont contacté Alexandre. Le concours n’est autre que la version française du format TV britannique ‘The Great British Bake Off’. Le jury est composé du chef et pâtissier Cyril Lignac et de la célèbre blogueuse française Mercotte. Les candidats doivent passer trois épreuves lors de chaque épisode. Pour l’épreuve du ‘classique revisité’, chaque participant prépare une recette de son choix sur base d’un thème imposé par Cyril Lignac. Pour l’épreuve technique, ils doivent préparer une recette selon les instructions de Mercotte, qui prend bien soin d’omettre quelques détails techniques essentiels. Et, enfin, pour l’épreuve créative, les participants préparent leur propre création originale sur un thème spécifique.
Une renommée numérique
Alexandre voit beaucoup de positif lorsqu’il se remémore l’émission TV. Le bon encadrement, le professionnalisme de l’équipe, la collégialité et la motivation positive des membres du jury font taire tous les clichés des émissions un peu moqueuses ou purement commerciales. Le jury a discuté de chacune de leurs créations avec les participants et il a aidé chacun d’eux à progresser, grâce aux nombreux trucs et astuces des professionnels. Bien entendu, ce n’est pas demain la veille qu’un Belge viendra remporter un concours télévisé français. Alexandre s’était fait à cette idée. Mais il reste fier de sa belle place en finale. Seul le podium virtuel lui tenait à cœur. Cette célébrité à l’écran a aussi été un véritable tremplin pour sa page Instagram. “L’intensité du concours, associée aux heures de tournage, est beaucoup plus éprouvante qu’il n’y paraît”, explique Alexandre. “À la télévision, tout s’enchaîne, mais l’émission est montée et coupée à la seconde près. Dans la pratique, c’est tout autre chose.”
Photo: Alexandre Formica : “Un compte Instagram est l’équivalent en ligne d’une vitrine soignée et attrayante.”
Pendant les émissions, Alexandre a reçu beaucoup de soutien de la part de ses followers. “J’ai vite compris qu’Instagram faisait une belle différence. 116 000 personnes me suivent et me motivent encore plus à poster chaque semaine une nouvelle création accompagnée de sa recette. Je considère cela comme un hobby qui a dérapé. La photographie, la typographie et l’identité visuelle m’importent énormément pour mon compte. J’y échange aussi des conseils sur la pâtisserie ou encore des suggestions au gré de ma créativité. Des pâtissiers français imitent mes recettes dans leur propre atelier avant de les poster sur les réseaux. Quant à savoir si je vais ouvrir ma propre boutique ou si je vais sortir un livre, je ne veux et ne peux pas répondre à la question pour l’instant. Mais il ne faut jamais dire jamais. Je ne ferme aucune porte, mais je ne me sens pas du tout influenceur. Cela ne m’intéresse pas le moins du monde de créer des posts pour des marques de vêtements ou du matériel ménager. J’ai certes prévu des ateliers et des démonstrations, mais on est encore loin de l’ouverture de ma propre pâtisserie. Si je voulais lancer une activité commerciale, cela devrait être quelque chose de complètement différent par rapport à ce qui existe déjà aujourd’hui.”
Moins de sucre, plus de réseaux sociaux
Photo: Alexandre partage ses créations sur Instagram. Le souci du détail fait toute la différence.
Même si Alexandre n’est pas officiellement un professionnel – il n’a pas son propre commerce –, il sait très bien repérer les dernières tendances. “À l’heure actuelle, il faut réduire l’utilisation du sucre si on veut se respecter soi-même et respecter ses clients. Il y a encore trop de sucre à tous les niveaux de la pâtisserie. On peut aussi trouver le bon équilibre avec des sucres naturels comme du sucre de fleur de coco ou du sirop d’érable, car on ne peut pas non plus supprimer complètement le sucre d’une recette. Il en va de même pour la farine de blé. On peut tout aussi bien réaliser certaines recettes avec de la farine d’épeautre ou de lupin, qui contiennent moins de glucides ou de gluten, voire pas du tout. On observe aujourd’hui cette tendance à Paris. Les pâtisseries qui proposent des produits allégés en sucre ou sans sucre comme Oh Oui ! et Les Belles Envies sont extrêmement populaires – auprès d’un public cible plus important que ce qu’on pourrait penser.”
“Pour ce qui est des réseaux sociaux, je constate que beaucoup de boulangeries y accordent encore trop peu d’attention et ne prennent pas suffisamment soin de leur image. Elles prétextent le plus souvent un manque de temps. Néanmoins, il est indispensable, à l’heure actuelle, d’investir dans les réseaux sociaux tout comme il était crucial, auparavant, de présenter une vitrine soignée qui donnait envie de franchir le seuil de l’établissement. Je vois trop de pâtissiers qui restent bloqués dans les années 90. L’avenir sera encore plus axé sur le digital que maintenant, c’est une certitude.” Alexandre prend Cédric Grollet comme exemple de réussite. “Dans notre secteur, il y a très peu de professionnels qui comptent des millions d’abonnés grâce à leurs recettes et leurs créations.” Mais l’effet est indéniable. “Bon nombre de touristes sont prêts à faire la file pendant des heures pour goûter une pâtisserie de Cédric Grollet.”
Une vitrine contemporaine
Votre site web et votre compte Instagram sont aujourd’hui la véritable vitrine de votre commerce. “Il faut dès lors les utiliser de façon optimale et recourir le plus possible aux différentes options comme les reels, les stories, les mots-dièse, etc.”, conclut Alexandre. “Montrez comment vous foncez une tarte ou comment vous mélangez une mousse au chocolat.” Voilà ce que les clients veulent voir. Il faut utiliser les réseaux sociaux pour les fins auxquelles ils ont été conçus. “Et cela va au-delà de quelques photos de votre assortiment et d’un aperçu des heures d’ouverture”.
Alexandre partage dans l’ édition P&P, no3 de 2023 également la recette de sa ‘Fraisette’.
exte : Bureau 44
Photos : Jakub Mazur (The Image Factory)
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